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Posted on 3rd Oct, 2019 in Géologie

«La Montagne de Lumière » . C’est ainsi qu’appelaient – géographes et alpinistes – le Caroux au début du siècle dernier. C’est l’histoire de paysages de rocs et de gorges baignés par une chaude lumière méditerranéenne que je vous invite à découvrir.

SITUATION :

Le Caroux fait parti des Monts de l’Espinouse, massif du Haut Languedeoc appartenant aux Cévennes méridionales, isolé entre Montagne Noire à l’Ouest et Causse du Larzac au Sud. Le Caroux culmine à 1091m et 46km seulement le sépare de la mer. Sa forme tabulaire est très facilement repérable dans le paysage. Sur une carte, nous le limiterons par un rectangle d’environ 4km de long entre les gorges de Colombières à l’Est et les Gorges d’Héric à l’Ouest, pour 2,5km de large entre la vallée de l’Orb au sud et la Haute Vallée de Douch qui le sépare de l’Espinouse proprement dite.

HISTOIRE :

Racontons son histoire vieille de 300 millions d’années.

Vous le savez maintenant, il y a environ 500 millions d’années et pendant près de 200 millions d’années, la région appartenait au domaine marin, d’une mer qui séparait deux continents : la Laurasia au Nord et le Gondwana au sud. De la collision de ces deux continents sortirent des eaux , icl y a 300 millions d’années une chaîne de montagne, appelée hercynienne.

Ainsi culminèrent un temps à plus de 5000m, le vieux Massif Armoricain, les Vosges, le Massif Central, la Montagne Noire et le Caroux-Espinouse puis furent démantelées, rabotées, aplanies en 50 millions d’années. Le Caroux vécut une grande période d’accalmie pendant toute l’ère Secondaire, il ne culminait plus qu’à 200 ou 300m. La mer était revenue à ses pieds et l’ancêtre de l’ Orb coulait péniblement en larges méandres. Avec l’ère Tertiaire, notre terre bougea une fois encore . D’un continent unique, la Pangée, se différencièrent les plaques qui font notre monde. Leurs mouvements ne se firent pas sans heurts. Du choc entre la plaque Africaine et Eurasienne surgirent les Pyrénées, puis les Alpes, il y a 40 millions d’années pour les premières et 10 millions d’années pour les secondes. Pendant ces mouvements tectoniques puissants, les vieux massifs érodés subirent de fortes poussées Nord – Nord Ouest qui les soulevèrent, d’environ 1000m, à l’image d’ un soc de charrue relevant une dalle, la faisant émerger de terre sans la retourner. Le vieux massif, disloqué, découpé par des failles , les unes anciennes Est-Ouest du premier plissement hercynien, les autres récentes Nord Est – Sud Ouest du plissement alpin, allait à nouveau, du fait de son rajeunissement, subir à nouveau l’ érosion. Des gorges se creusent et l’Orb pourra reprendre lui aussi son travail de sape, s’ enfoncer dans son lit, tout en conservant son tracé sinueux vestige de l’époque ancienne.

LES ROCHES

Bien que des divergences demeurent sur le mécanisme de mise en place de la zone axiale de la Montagne Noire, dans le cas qui nous intéresse les Monts de l’ Espinouse , les géologues sont tombés d’accord pour dire : il existait un ‘’socle’’ ancien granitique et des schistes ‘’X ‘’ surmontant ou enveloppant le granite primaire. Lors de l’orogenèse hercynienne, ce socle primitif et son enveloppe a été transformé, déformé et plissé. Trois grands ensembles se mettent en place : superbes structures, au relief grandiose de nouvelles roches ont pris naissance par métamorphisme et anatexie.

Expliquons !

Le métamorphisme général est un ensemble de phénomènes physico-chimiques qui se produit lors de la préparation et la mise en place de chaînes de montagne et il affecte toutes les roches préexistantes. Pris dans les mouvements tectoniques, les terrains, jadis en surface, vont être enfouis progressivement dans l’ écorce terrestre en mouvement et subir des pressions fantastiques et des températures de plusieurs degrés. Lentement, sans fusion, dans un état solide ou partiellement visqueux, la matière va se transformer et se réorganiser donnant naissant à de nouvelles roches. Les roches métamorphiques sont très nombreuses, chacune est caractérisée par son origine et par le degré de métamorphisme qu’elle a subi, c’est à dire des conditions de température et de pression qu’elle a supportée. Ainsi sont nés, schistes, marbres, quartzites, micaschistes, gneiss, etc …

L’anatexie est le processus par lequel des roches de métamorphisme général soumises à des températures de plus en plus fortes subissent une fusion pour finalement donner un magma. Ainsi se forment certains granites. *Il existe des cas plus localisés de métamorphisme, tout autour, par exemple, d’un massif granitique se développe une auréole de métamorphisme. Il s’agit d’une transformation locale, sur quelques mètres, voire du kilomètre, des roches sédimentaires encaissantes, liée à l’augmentation de température provoquée par l’intrusion granitique. On parle de métamorphisme de contact.

**ITINERAIRE

Les promenades et randonnées sont multiples et variées dans le Caroux, certains guides en proposent jusqu ‘à 75. Le massif est balisé aussi bien pour les promeneurs-randonneurs que pour les alpinistes-grimpeurs.

Parmi les multiples itinéraires possibles, mon choix s’est porté sur celui des gorges d’Héric, car il nous permettra de prendre connaissance de la structure du Caroux dans son ensemble et en remontant le ruisseau jusqu’au hameau d’Héric, d’observer l’une des plus remarquables coupes naturelles dans les gneiss que l’on observe en France (dénivellation de 900m)

A l’entrée des gorges (alt. 200m) nous trouverons des micaschistes. Ce sont des roches métamorphiques (épi- à mésozonales, c’est à dire issues d’un métamorphisme relativement moyen), d’aspect feuilletée, à schistosité et foliation marquée et constituée d’alternance de lits de micas noirs visibles à l’œil nu et de lits riches en gros quartz blanc.

Ensuite, nous pénétrerons dans les gneiss, au cœur du métamorphisme, jusqu’au hameau d’Héric (alt ; 514m). Nous y verrons essentiellement des gneiss dits ‘’oeillés’’, faits de gros cristaux de feldspaths potassiques ayant la taille et la forme d’un œil entourés de cristaux plus fins de feldspaths, de micas et de quartz, et lardés de filons et injections diffuses de pegmatites et d’aplite. Ces roches, de la famille du granite, sont issues du magma et sont venues s’injecter dans la structure des gneiss. Les pegmatites constituées de gros cristaux de quartz, de feldspaths, de micas et de tourmaline en baguettes noires recoupent en filons les gneiss. Les aplites, granite de teinte claire et à grains fins, viennent si insinuer à petits plis.

Le Caroux est un grand antiforme, tout en remontant les gorges nous pourrons observer cette structure et suivre son évolution, en observant la foliation des gneiss : au début des gorges, sa pente est assez forte 60° - 70° vers le sud, puis elle devient plus faible pour devenir à peu près horizontale à mi-chemin du hameau d’ Héric dans les gneiss fins qui se trouvent sous les gneiss oeillés et reprendre ensuite de fortes valeurs.

En arrivant près d’Héric, on retrouve les micaschistes à micas noirs , ils font partis du synforme de Rosis que nous suivront jusqu’à Douch, en passant par le col de l’ Airole (949m).

La suite de l’itinéraire, nous fera traverser entièrement le plateau par une lande de bruyères au sol tourbeux et nous mènera sur son rebord méridional à la table d’orientation (alt. 1039m). Le panorama y est grandiose, il couvre tout le littoral languedocien , des Cévennes à l’est aux Pyrénées à l’ ouest en passant par la Montagne Noire et le sillon du Jaur à nos pieds. Nous redescendrons dans les gorges par l’arête sud-ouest en suivant le sentier des Gardes.

**CONCLUSION

Nous n’avons parlé pratiquement au cours de cette journée que d’une seule roche aux milles yeux, le gneiss, et vu pourtant un paysage d’une exceptionnelle beauté. Dans ce territoire restreint, c’est une mosaïque de décors que la nature nous a laissé. Dans les hasards de son relief, l’automne y sera doux et flamboyant ; l‘ hiver, la neige blanchira ces cimes ; le printemps y sera richement fleuri et parfumé ; quant à l’été, gorgé de soleil, il baignera de lumière.

Le Caroux est un site naturel, faisant parti du Parc Régional du Haut-Languedoc, la conquête par l’homme n’y a été que passagère des temps les plus anciens à nos jours et c’est au rythme de nos pas qu’il se laisse un peu découvrir.

« … A peine a-t-on fait cinquante pas en grimpant le long de cette pente très raide que, si l’on s’arrête une minute pour respirer et si l’on se retourne, on est tout à coup saisi d’admiration (..) L’Orb, un peu maigre, serpente au fond de la vallée, laissant à découvert des roches micacées que le soleil , de temps à autre, allume ainsi que de gigantesques diamants. Et puis, si l’œil s’égare au-dessus de la rivière semée d’îlots, quel spectacle splendide que celui des épaisses forêts de châtaigniers prenant racine aux premiers mamelons de la plaine et se prolongeant avec leur frondaisons qui moutonnent sous le vent ou étincellent sous la lumière jusqu’aux crêtes sourcilleuses du roc de Caroux … ». Ferdinand FABRE - 1890

LE CAROUX

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LA LEGENDE DE LA FEMME COUCHEEE**

Je viens de vous raconter l’histoire « géologique » du Caroux, celle d’ un géant qui culminait à plus de 5000m , c’est une vieille histoire de 300 millions d’années….. mais, vous lui préfèrerez sans doute sa légende!

Une histoire de Titans! Ecoutez….

« En ce temps là vivaient les géants. Cruels, ils meurtrissaient la terre, dévastaient la nature, offensaient le ciel dans les batailles terribles qu’ils livraient sans cesse.

Impuissants à les calmer, Terre et Ciel se mirent d’accord pour en détruire entièrement la race. Jupiter jeta la foudre dans leurs combats. La Terre tendit ses pièges. Cébenna et Réa survécurent seuls. C’est que, contrairement à ceux de leur race, ils étaient doux et paisibles, allant la main dans la main, sensibles aux beautés de la nature, de l’aube, du crépuscule, aux charmes des fleurs, aux chants des oiseaux. Ils affectionnaient par dessus tout un plateau et un roc appelé Caroux d’où leurs regards pouvaient glisser par dessus vallées et monts, vers la mer aux horizons infinis.

« Qu’ils meurent ! » criait furieux le Dieu de l’Olympe, impatient de créer une race nouvelle. La Terre, que tant de grâce et de douleur touchaient, hésita longtemps…puis céda enfin. Un soir que l’air était parfumé et d’une grande douceur, Cébenna s’étendit sur le roc pendant que Réa remontait le lit du ruisseau d’Héric. Elle suivait d’un œil distrait de petits nuages roses courant sur le couchant. Surprise, elle sentit sous son poids le roc s’amollir, se creuser. Effrayée, elle lança ses bras et ses jambes en un brusque sursaut. La pierre devenue glu immobilisa ses membres, recouvrit son corps. Alors dans un suprême effort, elle renversa sa tête en arrière, poussa un cri de désespoir et d’agonie, et les larmes s’échappant de ses yeux tombèrent goutte à goutte dans les eaux du Rieutord.

Réa, au cri poussé par Cébenna, voulut s’élancer vers elle. Hélas ! sous l’effort, ses pieds s’enfoncèrent comme aspirés par le lit du torrent. Il tomba à genoux pendant que ses mains s’appuyaient à la paroi rocheuse où elles demeurèrent fixées. Dans un effort surhumain où ses os craquèrent, il essaya d’échapper à l’étreinte…il s’enfonça jusqu’aux épaules, puis la glu rocheuse s’éleva, épousa la forme de sa tête, étouffant son dernier râle, pendant que l’Héric déferlait en grondant…

« C’est ainsi que tel le gisant de pierre d’un tombeau, le corps de Cébenna, l’infortunée fille des Titans, dessine à jamais ses formes au sommet du Caroux »

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